La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



vendredi 8 février 2019

Si vous marchez dans la grand-rue, un après-midi du mois d’août, vous ne trouverez rien à faire.

Carson McCullers, La Ballade du café triste et autres nouvelles, traduit de l’américain par Jacques Tournier, parution originale 1943.

J’ai eu envie de relire ce recueil.
La longue nouvelle, La Ballade du café triste, se campe dans une petite ville du sud des États-Unis, couverte de poussière et un peu abandonnée. Le récit repart en arrière et suit la vie de Miss Amelia, une maîtresse femme, haute comme un homme, qui dirige ses affaires en patronne. Quand, un jour, débarque le cousin Lymon (un vrai cousin ?), un bossu qui devient le centre d’attraction de la ville et le centre de la vie de la pauvre Amelia. Elle le bichonne. Quand, un jour, débarque quelqu’un qui est bien décidé à se venger de cette femme et de l’affront qu’elle lui a infligé. 

Elle semblait regarder à l’intérieur d’elle-même, avec un mélange de stupeur, de chagrin et de joie encore incertaine. Elle serrait les lèvres avec moins de force que d’habitude, et elle les humectait souvent. Sa peau semblait plus pâle. Ses grandes mains étaient moites. Elle avait, cette nuit-là, le regard solitaire de quelqu’un qui aime.

Tout cela est raconté d’une langue précise et poétique à la fois. Tous ces personnages manquent d’amour, éprouvent un grand vide à l’intérieur d’eux et ne trouvent pas à se rassasier, ni dans l’activité quotidienne, ni dans la foi, ni dans les relations humaines. Dans cette nouvelle il est constamment fait référence aux marais, qui apporte air humide, vent, oiseau, légende… un espace totalement absent du récit mais omniprésent dans les nuits et les rêves des personnages.
Les autres nouvelles sont plus courtes. Wunderkind a comme héroïne une adolescente, élève pianiste, qui découvre ses limites, en affection comme en technique musicale. Madame Zilensky et le roi de Finlande se passe encore dans une école de musique, mais il est question d’une femme, de sa solitude, de son besoin viscéral de raconter des histoires et d’avoir une vie palpitante. Dans les autres nouvelles, il y a aussi des personnages masculins fragiles dans leur couple.
Ici les personnages préfèrent enfouir leurs rêves et leurs déceptions, mais quelquefois tout remonte à la surface par une faille et s’écoule, comme une émotion un peu indécente.
Ce recueil dégage une grande mélancolie.

G. Davies, La sculptrice E. Wyn Wood, 1936, musée d'Ottawa
L’ouvrier de la filature, qui ne pense qu’à son métier, à sa gamelle, à son lit, et de nouveau à son métier – cet ouvrier devrait en boire un peu le dimanche et cueillir une jacinthe d’eau, et tenir la fleur dans sa paume ouverte, et apprendre comment est fait le fragile calice d’or, et la tendresse l’envahirait soudain, fulgurante comme la douleur. Cet ouvrier de la filature apprendrait soudain à lever les yeux, à regarder pour la première fois la splendeur inquiétante et givrée d’un ciel de janvier à minuit, et son cœur s’arrêterait d’effroi devant sa propre petitesse.


J’ai acheté Le Cœur est un chasseur solitaire, je vais donc pouvoir continuer ma lecture !




2 commentaires:

Dominique a dit…

j'ai acheté il y a peu le quarto de son oeuvre, y a plus qu'à, une de mes filles a à peu près tout lu d'elle et apprécie beaucoup comme nous avons des goûts proches je sais que ça va me plaire les auteures du sud ont un talent fou

nathalie a dit…

Oui en effet je pense que ça te plaira. Je vais essayer de lire le roman dans pas trop longtemps.