La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 18 janvier 2022

Elle l’aime, même si elle a seulement un tout petit peu peur de lui.

  

Joyce Carol Oates, Poursuite, parution originale 2019, traduit de l’américain par Christine Auché, édité en France par Philippe Rey.

 

Un court roman de couple et de famille, très réussi.

Au début du roman, Abby est renversée par un bus, le lendemain de son mariage avec Willem, et elle plonge dans le coma. Tout le monde conclut à un accident, mais celui-ci se pose des questions, d’autant que la jeune épouse sans histoire vit un cauchemar récurrent à base de squelettes. Le cœur du roman est constitué par l’histoire des parents d’Abby, racontée du point de vue de la mère ou de celui du père.

Le roman tout entier est d’abord marqué par le cauchemar d’Abby, où les squelettes et les crânes surgissent dans les herbes folles. Il est très saisissant. Est-ce un souvenir ? Est-ce un rêve ? Une hallucination ? Raconté à plusieurs reprises, avec d’infimes variations, il perturbe notre compréhension de l’histoire. Le lecteur confronte à diverses reprises les témoignages des uns et des autres avec cette vision terrifiante et se demande qui croire. Il peut s’égarer. Il attendra jusqu’à la dernière page pour connaître le fin mot de l’histoire.


Dans les herbes hautes, les os éparpillés ensemble donnaient (presque) l’impression de danser. Gisant là où ils étaient tombés à cette époque très lointaine.


Il y a aussi le couple constitué par les parents d’Abby. Un homme violent et possessif, une femme terrifiée qui cherche à protéger sa fille. Mais il y a surtout ce qui se passe dans la tête du lecteur, qui en vient progressivement à se demander s’il ne conviendrait pas d’établir un parallèle entre le si gentil et positif Willem et ce père. Bien sûr, il a l’air très bienveillant, mais il a aussi des idées bien arrêtées sur ce qui convient ou ne convient pas à une femme et sur le rôle de chacun. Voilà qui est troublant et contribue également à égarer le lecteur : finalement qui mène cette Poursuite ? Qui est poursuivi ?

Un plaisir de lecture.

 

W. Berman, Sans titre, collage, 1964 Dallas Museum of Art

Fasciné, Willem regarde sa femme dormir. Sur son visage, des ombres volettent telles des ailes de chauve-souris.

 

Une autrice.

Oates sur le blog :

Nous étions les Mulvaney
Carthage
Maudits

 

 

7 commentaires:

keisha a dit…

Une auteure intéressante, mais qui parfois me donne le malaise. Ces cauchemars n'arrangent rien. ^_^

Ingannmic, a dit…

Ah, très tentant ! Je lis régulièrement cette auteure, avec des résultats très variables, entre coups de cœur et déceptions, parfois profonde... j'ai son "Livre de martyrs américains" sur ma pile, mais je note celui-ci.

nathalie a dit…

Mudwoman ne m'avait pas du tout plu, mais celui-ci est très bien. Et court !

nathalie a dit…

J'aime bien la veine gothique pour ma part, comme dans Maudits.

keisha a dit…

Merci de confirmer pour mudwoman ^_^, alors si c'est court, OK ça va mieux.

miriam a dit…

Cela fait longtemps que je tourne autour de cette auteure mais os et squelettes ne me disent rien

Nathalie a dit…

Petite nature…