La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 13 février 2024

Car aux lignées condamnées à cent ans de solitude, il n’était pas donné sur terre de seconde chance.

 


Gabriel García Márquez, Cent ans de solitude, parution originale 1967, traduit de l’espagnol par Claude et Carmen Durand.

 

Une immense farce.

L’histoire, pendant 100 ans et 400 pages, du village de Macondo et de la famille Buendia. Les hommes qui portent tous les mêmes prénoms. Les femmes à la vie recluse et qui meurent un peu facilement, parce que ce ne sont pas elles les héroïnes (leur rôle n’est guère enviable). Le sexe qui embrase tout. Les excentricités. La guerre, la guerre civile d’un pays imaginaire des Caraïbes, la sécheresse, la plantation américaine, le chemin de fer. Et les miracles. C’est que l’auteur ne fait pas les choses à moitié. Quand il pleut, il pleut trois ans.


Les années de maintenant ne sont plus comme dans le temps.


Si la vie est un éternel recommencement, il faut quand même sans cesse faire face à l’inattendu. Y compris pour le lecteur à qui le roman tend des chausse-trappes, car tout n’est pas raconté exactement dans l’ordre. Et puis des choses sont dites alors qu’elles sont fausses et d’autres ne sont pas dites, mais on peut quand même se poser la question.

Les automates merveilleux, le galion espagnol échoué, les oiseaux, le juif errant, les spectres, la terreur d’un train plein des cadavres des ouvriers, des couples touchants… mais tout sera oublié, renvoyé à l’état de légende ou de croyance, excepté pour une ou deux personnes qui ne pourront vraiment se souvenir ni faire part de leur expérience.

Un immense plaisir de relecture.

Rousseau, Le Rêve 1910 Moma
 

Bien des années plus tard, face au peloton d’exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l’emmena faire connaissance avec la glace. Macondo était alors un village d’une vingtaine de maisons en glaise et en roseaux, construites au bord d’une rivière dont les eaux diaphanes roulaient sur un lit de pierres polies, blanches, énormes comme des œufs préhistoriques. Le monde était si récent que beaucoup de choses n’avaient pas encore de nom et pour les mentionner, il fallait les montrer du doigt.

C’est le début. Un début trompeur (parce qu’il laisse croire que… alors que pas du tout), qui inscrit le roman dans un temps géologique et mythologique, mais plein d’humour.

 

En reconnaissant la voix de son arrière-grand-mère, il tourna la tête vers la porte, essayé de sourire et, sans le vouloir, répéta une ancienne phrase d’Ursula.

- Que voulez-vous, murmura-t-il, le temps passe.

- C’est un fait, répondit Ursula, mais pas à ce point-là.

En disant ces mots, elle se rendit compte qu’elle était en train de lui adresser la même réplique qu’elle avait reçue du colonel Aureliano Buendia dans sa cellule de condamné et, une fois de plus, elle fut ébranlée par une autre preuve que le temps ne passait pas – comme elle avait fini par l’admettre – mais tournait en rond sur lui-même.

 

C’est une relecture. Il y a donc un premier billet.

 

García Márquez sur le blog :


Il s'agit de ma deuxième participation au mois latino-américain d'Ingannmic.




11 commentaires:

Sandrine a dit…

Ma lecture de ce livre formidable date d'il y a 35 ou 40 ans, misère... il y a toujours à l'intérieur de mon exemplaire l'arbre généalogique dessiné à l'époque... et je me souviens clairement de scènes, notamment quand les femmes secouent les draps et s'envolent...

je lis je blogue a dit…

Merci pour cette piqure de rappel. J'ai lu ce roman, il y a très longtemps. Je me souviens de l'avoir aimé mais de m'être un peu égarée dans les méandres de l'histoire et d'avoir confondu les multiples personnages.

nathalie a dit…

@Sandrine : C'était presque hier ! Oui il y a des scènes très fortes, qui nous marquent, dans toute cette folie et cette longue histoire.

@JeLisJeBlogue : C'est le jeu non ?

Ingannmic, a dit…

Comme Sandrine, sauf que moi, je ne me rappelle de rien du tout ! J'aimerais le relire, ainsi que L'amour au temps du choléra.

dominique a dit…

une lecture que j'ai faite il y a ....mais je l'ai relu en même temps que mes filles ...et depuis une dernière fois pendant le confinement car c'était un voyage extraordinaire

La chèvre grise a dit…

Il faudrait que je le relise. J'avais adoré ma découverte, il y a une dizaine d'années je dirais. Je ne me souviens pas du tout de l'histoire, mais de l'ambiance et des sensations lors de ma lecture oui. Pourtant, j'avais entamé cette lecture très sceptique, pensant d'entrée que ça ne me plairait pas.

nathalie a dit…

@Ingannmic : J'ai lu L'amour au temps... l'année dernière (j'ai aussi profité du mois de février).

@Dominique : je vois que tu es une fidèle adepte. On peut le lire et le relire à l'infini ce livre !

@LaChèvre : Je crois que personne ne se souvient vraiment de l'histoire, qui s'envole dans le vent, mais il reste des moments marquants, une atmosphère particulière, et le souvenir des heures de lecture.

claudialucia a dit…

Je suis réfractaire à cette lecture commencée plusieurs fois et abandonnée plusieurs fois. Il faudra que je m'y remette... Peut-être que maintenant je pourrais être accrochée ?

nathalie a dit…

@ClaudiaLucia : oh mince. C'est dommage de ne pas réussir à se laisser porter par la fantaisie du roman.

Miriam a dit…

Il faut que je le relise. Souvenir du plaisir de la lecture plus que de l'histoire

nathalie a dit…

@Miriam : j'ai l'impression que tu n'es pas la seule dans ce cas.