Le blog est à Venise. Aujourd'hui, c'est le jour de Vittore Carpaccio (1465-1525).
Ce peintre de la Renaissance a travaillé pour plusieurs scuole (ces confréries socialo-religieuses, véritables lieux d'influence) (dont la plupart ont été fermées par Napoléon), notamment pour la Scuola Dalmata di San Giorgio degli Schiavoni (1501-1503). Comme son nom l'indique la Scuola Dalmata avait pour objectif de venir en aide aux marins et autres personnes de Dalmatie (venant notamment du Monténégro). En 1502 elle reçoit les reliques de Saint Georges. L'édifice est tout petit - ou disons que l'on visite seulement deux pièces, qui sont à la fois salles de réunion et salles de prière et lieu possible pour la messe. Au rez-de-chaussée, Carpaccio a réalisé un ensemble de peintures illustrant les exploits de Saint George, de Saint Tryphon et de Saint Augustin.
C'est absolument magnifique !
Saint Georges, dans son armure noire rutilante, sur un beau coursier qui montre bien la tête au spectateur, fonce sur un dragon très féroce (quand même une tête de chien qui a avalé un os de travers). Le sol est jonché de petits bouts de cadavres, dans un paysage minéral. J'ai quand même bien l'impression que Carpaccio se confronte à Mantegna dans ce décor (Lamentation sur le Christ mort par exemple). Les têtes de mort côtoient les coquillages - je trouve le peintre bien taquin.
Sur la toile suivante, Saint Georges amène le petit chien, pardon le dragon, en laisse au pied du roi.
Deux toiles sont ensuite consacrées à Saint Tryphon (pas l'auréole la plus connue des cieux) qui exorcise la fille d'un roi.
Vient ensuite un cycle consacré à Saint Augustin, dont cette peinture :
Saint Augustin arrive dans un monastère et sème la terreur avec son gros lion (qui se tord la tête à cause de la douleur à la patte). J'aime beaucoup la fuite des grandes robes blanches. Le jardin est un petit paradis et il est plein d'animaux de toute sorte, qui sont traités avec un grand réaliste et abondance de précision.
Le Songe de Sainte Ursule provenant de la Scuola di Sant'Orsola. Une seule toile, mais quel chef d'oeuvre ! Un riche intérieur vénitien : le lit à colonnettes, les tapis, chandelles, vases, livres. Surtout ce silence parfaitement rendu, le calme et la lumière du rêve avec l'irruption de l'ange sur le pas de la porte. Les personnages sont petits, chacun à un bout du tableau, le tableau ne figure rien, mais tout se transmet à celui qui s'immerge dedans.
Enfin, au palais ducal, nous voyons cet emblématique Lion de Saint Marc peint par l'artiste en 1516 :
Animal emblème de l'évangéliste parce que Venise a une destinée divine (bien sûr), les pattes sur l'eau, mais aussi les pattes sur terre ferme parce que l'on n'oublie pas que la richesse provient aussi des conquêtes territoriales et des vastes domaines agricoles et pas seulement du commerce comme on le fait croire trop souvent. Les plantes sont traitées avec une savante précision. À l'arrière-plan, le palais ducal, les dômes de la basilique, le campanile, une tour évoquant l'arsenal et quelques bateaux. Autoportrait de la ville.
Les oeuvres de Carpaccio se voient aussi dans les églises de Venise (guettez-les) ou dans plusieurs musées du monde entier (un extraordinaire Jeune homme en armure dans un jardin à Thyssen-Bornemisza, Madrid).
Venise, église San Vidal, en attendant la musique. |
La toute fin de la page Wikipedia contient une révélation surprenante (rubrique « hommages »), mais je vous conseille de vous rendre ensuite sur la page italienne où vous trouverez bien plus de précision.
La semaine prochaine, une église, un autre peintre.
Oui, les hommages, on en apprend!!!
RépondreSupprimerLe petit chien est trop mimi.
Tryphon, mais oui, c'est le prénom de ... , l'auteur l'avait pris d'une personne qu'il connaissait (je te laisse chercher)
Tournesol !!!! Et j'ai pas cherché, j'ai paisiblement laissé le souvenir revenir tout seul.
SupprimerL'anecdote hommage est amusante mais je ne sais pas si le peintre aurait apprécié ! Le tableau où St George terrasse le dragon est un peu gore quand y regarde de près ! Merci pour ce petit reportage culturel.
RépondreSupprimerJe ne sais pas pour Carpaccio mais les peintres de la Renaissance n'étaient pas avares de trucs promotionnels, en particulier à Venise où la concurrence était rude.
SupprimerJ'allais te demander s'il avait un lien avec le plat, puis j'ai soupçonné que j'allais trouver la réponse à cette question en suivant ton lien vers Wikipédia !...
RépondreSupprimerC'est un vrai blog culturel.
SupprimerJe reviens de Naples et je suis en train de programmer quelques jours à Venise pour cet hiver ... Merci de m'y amener déjà !
RépondreSupprimerNaples... j'aimerais bien y retourner avant la prochaine éruption du Vésuve. Peut-être mon prochain projet italien.
Supprimerun beau souvenir !
RépondreSupprimerUn tout petit édifice tranquille.
SupprimerMerci pour cette visite et surtout pour l'attention que tu as prêté aux détails coquillages petit chien et mal à la patte du lion
RépondreSupprimerC'est une peinture qui appelle l'attention aux détails.
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