William Faulkner, Tandis que j’agonise, traduit de l’américain par Maurice Edgar Coindreau, parution originale 1930, édité en France par Gallimard.
Une farce macabre – très farce, très macabre.
Dans une famille de pauvres paysans blancs du Mississippi, la mère de famille meurt. Tout le monde se prépare à un long voyage en charrette, car elle a exprimé le vœu d’être enterrée auprès de ses parents. On est au mois de juillet et les voici tous – la mère morte, le père, les 4 fils et la fille – partis pour un voyage, avec le pique-nique, les mouches, les asticots et les rapaces (bah oui). Et rien ne se passe comme prévu, du moins pour les enfants, car le père s’en sort toujours très bien.
La respiration de notre père rend un son tranquille et rêche. Il promène sa chique sur ses gencives. « Que la volonté de Dieu soit faite, dit-il, j’vas donc pouvoir maintenant m’acheter ces dents. »
Un Faulkner bien différent de ceux que j’ai lus jusqu’à présent. Ici, place au grotesque, à la farce, à l’humour grinçant, mais c’est noir, très noir et cela vire vite au tragique. Il suffit de quelques lignes pour violer une femme ou pour interner un homme, mais tous les drames se digèrent en des marmonnements calmes, sans cri et sans larme.
Je suis l’élu du Seigneur car celui qu’Il aime, Il sait aussi le châtier. Pourtant, c’est pas pour dire, mais je trouve qu’Il emploie de drôles de moyen pour le prouver.
Le roman est raconté par une alternance des points de vue. Nous passons de personnage en personnage, sans oublier la morte, dans un langage simple et oral. Nous découvrons ainsi les secrets et les préoccupations des uns et des autres. Le père veut de nouvelles dents pour manger des nourritures solides. Un fils veut son cheval. Un autre fils n’a pas les pieds bien sur terre. Ils semblent des étrangers les uns aux autres, mais en réalité se tiennent les coudes et avancent ensemble, avec leur cadavre de plus en plus puant, mais qu’ils ne sentent plus.
Comme la brise soufflait de la grande, nous l’avons mise sous le pommier, là où la lune peut moucheter de reflets de pommier les longues planches dormantes entre lesquelles, de temps en temps, elle parle en petites bulles qui crèvent et suintent, mystérieuses et secrètes.
La Mort en batteuse, 1670 Allemagne, ivoire, V&A |
Sur tout cela planent le puritanisme, la parole de Dieu, les discours moraux, les justifications bien ordonnées des comportements, tant de mots manipulés pour justifier un peu tous les comportements, les chances et les malchances et pour nier l’individu. La misère morale est profonde. Ils passeront par l’eau, le feu, les blessures et le mépris de leurs concitoyens, mais, imperturbables, continueront leur route.
C’est le mélange terrible entre le pragmatisme rugueux et la grande folie.
J’ai beaucoup beaucoup beaucoup aimé ce roman qui est tout simplement fabuleux.
La première fois que Lafe et moi on est allés cueillir le coton en suivant le sillon. Notre père n’ose pas suer parce qu’il attraperait la mort comme ça tous ceux qui viennent nous aider. Et à Jewel tout lui est égal pour ce qui est de s’intéresser aux choses il n’est point de la famille. Et Cash aime à scier en planches les longs jours tristes, jaunes et brûlants, pour les clouer à quelque chose. Et notre père pense parce que les voisins se traiteront toujours de cette façon parce qu’il a toujours été trop occupé de laisser les voisins travailler pour lui pour s’apercevoir de quelque chose.
Faulkner sur le blog :
Descends, Moïse
Le Bruit et la fureur
Sanctuaire
L’avis d’Ingannmic.
Un jour je le lirai!!!!
RépondreSupprimerSinon, j'ai emprunté puis rendu l'autre George, je veux tenter de lire Adam Bede avant. Pas gagné.
J'ai lu ses trois romans les plus connus, mais je lirai ensuite ses autres titres. Je ne compte pas m'arrêter là !
SupprimerUn de mes romans préférés, que j'aime le voir lire !
RépondreSupprimerIl est extra, je vais essayer de le prêter.
SupprimerJe n'ai lu que quelques nouvelles de Faulkner, il faudrait vraiment que je me lance, mais avec quel titre ?
RépondreSupprimerJe pense que tu peux commencer par celui-là. Il y a aussi Sanctuaire, qui est facile à suivre, mais qui est très très noir (celui-ci est davantage grinçant).
Supprimerun billet selon mon coeur, cette lecture où l'on balance entre épouvante et rire merci Mr Faulkner
RépondreSupprimerC'est vraiment un excellent roman ! Tragique et rire indissociables.
SupprimerJe note ton conseil à Marilyne, et ton enthousiasme...
RépondreSupprimerJ'aimerais bien faire quelques converties.
SupprimerIl faudrait que je le relise, je pense que beaucoup de choses m'avaient échappé lors de ma première lecture (même si je garde des souvenirs impérissables de "Lumière d'août" et "Le Bruit et la fureur").
RépondreSupprimerJ'ai hâte de lire Lumière d'août, notamment à cause du titre que je trouve très beau.
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