La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



samedi 29 octobre 2022

Art populaire québécois

 

 

Sur ce blog, j’ai déjà parlé de peinture canadienne (le Groupe des sept et Emily Carr). Aujourd’hui, suite à la visite des musées de Baie-Saint-Paul et de La Malbaie, il sera question d’art populaire québécois.

Je vous disais la semaine dernière que dès la fin du XIXe siècle les artistes et la riche bourgeoisie canadienne et américaine avaient fréquenté la région de Charlevoix et notamment la Malbaie, attirés par la beauté des paysages. Cette habitude a perduré jusqu’au XXe siècle. On trouve parmi ces peintres les noms de Clarence Gagnon, Jean-Paul Lemieux et de Marc-Aurèle Fortin et parmi les écrivains, au moins un nom m’est familier, celui de Gabrielle Roy.

Dès 1930, des villageois et des artistes organisent des expositions. Des collections se créent localement. La présence de ces artistes et collectionneurs encourage certains villageois, mais surtout villageoises, à créer à leur tour. Dans le monde rural, tout le monde a l’habitude de fabriquer et peindre son mobilier, de fabriquer ses rideaux et ses tapis, les mêmes outils et le même savoir-faire peuvent également permettre de créer d’authentiques œuvres d’art.

Alors que le musée de Baie-Saint-Paul est un classique musée d’art contemporain, avec une section ancienne, celui de La Malbaie est bien plus original. Son accrochage mêle de façon stimulante des objets rappelant la vie traditionnelle de cette région de pêcheurs, d’agriculteurs et de chasseurs (outils, meubles, jouets, photographies anciennes, qui sont autant de témoins de la vie quotidienne au XIXe et début XXe siècles), et les œuvres d’art produites par des artistes professionnels et par des artistes dits populaires de la région.

À gauche, les créations pleines d'humour de Francis Pariseau, qui réinventent le folklore de la vie dans les bois. À droite, les animaux mignons de Magella Normand. Plusieurs artistes exposés à La Malbaie vivent dans les villages des alentours et sont bien vivants.


À gauche, de bons vieux leurres pour la chasse au canard (on voit les mêmes en Camargue). À droite, les animaux réinventés de Gérald Hunt. Même outil, même matériau, pas même finalité.


L'art populaire... Je serais bien incapable de disserter sur le sujet (mais le musée de La Malbaie est très intéressant sur le sujet, z'avez qu'à y aller). Je lance quand même quelques thèmes de réflexion (et oui, il est très facile de trouver des contre-exemples). Des personnes qui ont un métier (tenir une ferme ou une épicerie) et pour qui l'activité artistique est seconde, par rapport à des artistes pour qui elle est centrale. Avec ce que cela suppose de revenus complémentaires, mais surtout de reconnaissance et de positionnement social différent de celui d'un artiste à 100 %. L'art populaire est aussi souvent produit au moyen des mêmes outils et matériaux que ceux de la vie de tous les jours (broderie, tissage, couture, travail du bois) au lieu de requérir des techniques spécifiques. Ce sont des techniques peu valorisées, dites artisanales, souvent maîtrisées par les femmes. Il y a un côté domestique dans cette activité (et de fait on imagine bien que les tapis peuvent être réalisés durant les très longs hivers de Charlevoix). Et puis il y a les thèmes: souvent des thèmes du quotidien, même si le musée montre bien aussi que les arts populaires peuvent avoir envie de rêver (en l'occurrence rêver de chaleur et de palmiers). Enfin, un volet concerne l'apprentissage : ces artistes n'ont pas suivi de cours de dessin, sans parler d'académies ou de visites de musée pour se former, et ont appris sur le tas comme on dit, de nos jours en regardant les reproductions dans les livres ou sur internet, mais pas toujours avec un enseignant. On parle souvent de trait naïf, pour dire en réalité que la perspective ou les proportions n'obéissent pas aux canons dont nous avons l'habitude.

L'art populaire, ce n'est pas que la vie rurale. Il y a aussi des avions et des bateaux (et moi-même, j'ai fait un patchwork avec un porte-container).

Deux créations de George-Édouard Tremblay (oui, celle de gauche est très laide). Un homme qui s'est saisi de la technique traditionnelle des tapis et des canevas pour en faire des oeuvres d'art (les femmes font du canevas et les mecs de l'art bien sûr), mais qui a surtout encouragé les habitantes à faire oeuvre d'imagination à partir de leur savoir-faire. Il a eu un rôle d'intermédiaire.


J'en viens aux sœurs Blanche et Yvonne Bolduc, de Baie-Saint-Paul. Elles ont développé des techniques originales (bas-relief en bois, tableau de graines) et se sont saisies de la peinture à l'huile.


À gauche, un tableau de graines. À droite une peinture sur bois avec des éléments sculptés en relief.

Deux tableaux de Blanche Bolduc. À gauche, La Halle. À droite Le Magasin d'artisanat : j'aime bien ce tableau, car c'est une jolie mise en abyme. On voit en effet deux automobilistes (un peu aisés donc, sans doute des touristes) qui s'arrêtent pour regarder, choisir et acheter un tableau comme celui-ci (qui se trouve donc à présent dans un musée).

(tout le monde a vu le film Mais qui a tué Harry ?)


La famille Bouchard compte plusieurs peintres et sculpteurs. Clarence Gagnon et Gabrielle Roy font partie des visiteurs réguliers de la famille.

À gauche, une peinture de Marie-Cécile Bouchard, Le Repas en famille (1940). À droite une peinture de Simone Bouchard, La Famille à l'ouvrage (1937). Vous voyez tout le monde en train de peindre, dessiner ou confectionner des trucs.


Quelques sculptures qui font partie du Jardin de Germaine par Roland Joncas.


Les grands tableaux de Marcel Dargis mettent en scène la vie des villages en composant de grandes compositions qui rassemblent des moments différents. À gauche, il est question de l'église et des diables (avec les visages rouges) et du conte québécois Le Diable des forges. À droite, vous reconnaissez l'église de Baie-Saint-Paul, des scènes de bord de mer et des scènes familiales. D'autres tableaux représentent la drave, la mise à mort du cochon, les enterrements, l'arrivée des Européens à Charlevoix, etc.

Robert Cauchon, La Basse-cour, 1939.

Toutes ces oeuvres sont accrochées soit au musée d'art contemporain de Baie-Saint-Paul (où les photos sont interdites, mais j'ai bravé tous les interdits et incité les autres visiteurs à en faire autant) et au musée d'art et d'histoire de La Malbaie.

Je découvre à l’occasion que Laure Conan, première écrivaine québécoise, est née à La Malbaie. J'avais lu Si les Canadiennes le voulaient ! un petit texte très politique. J’ai téléchargé deux de ses romans, nous verrons bien.


Un séjour au Québec : la ville de Québec ; 1701 : la Paix de Montréal ; Voyage en pays Huron-Wendat ; Trois-Rivières et le chemin du Roy ; Sainte-Anne-de-Beaupré ; À Charlevoix, le long du fleuve.

Il me reste trois billets à publier, mais ils viendront après une interruption de deux semaines, car je repars en vacances. Reprise des opérations mi-novembre.


 

8 commentaires:

Marilyne a dit…

Merci pour cette belle balade et les intéressantes réflexions sur l'art ( pour la diversité présentée grâce à tes photographies aussi ). Bonne vacances.

keisha a dit…

Sympa et coloré, merci!!!

eimelle a dit…

Merci pour les photos :)! C'est très intéressant!

nathalie a dit…

Le billet est venu naturellement après cette visite si intéressante !

nathalie a dit…

C'est un plaisir.

nathalie a dit…

Contente que ça vous plaise !

Anonyme a dit…

Merci pour la balade coloree! Côté livres as tu lu Le Bonheur d'occasion ?

nathalie a dit…

Oui et le billet paraîtra justement dans quelques jours.