La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



dimanche 25 novembre 2018

Emily Carr

Partir à Vancouver et surtout à Victoria, c’est aussi aller sur les traces d’Emily Carr. Qui ça ? Une peintre (1871-1945), née à Victoria, que l’on qualifierait plutôt d’expressionniste, qui s’est fait une spécialité de représenter la forêt et les totems.
Emily Carr
Une femme indépendante, qui a abondamment voyagé (au Canada, en France, en Alaska), dotée de ce tempérament de colons, propres aux habitants de la Colombie-Britannique. Ni mari ni enfants, mais plusieurs sœurs. La peinture lui rapportait peu et elle gagnait sa vie en élevant les bobtails, en louant des chambres, en faisant de la poterie et en publiant divers écrits (heureusement son autobiographie a été traduite en français et j’ai réussi à en trouver un exemplaire). La célébrité finit par arriver et elle fut associée au fameux Groupe des sept (dont je vous parlerai, probablement en 2019).
Carr, Dans la forêt, 1932, Vancouver Art Gallery.
Je me dois de préciser que je « n’aime » pas forcément ses représentations de forêt, mais je suis extrêmement sensible aux essais que font certains grands artistes, comme elle, pour proposer un nouveau mode de représentation de la forêt. La forêt n’est d’ailleurs pas facile du tout à représenter (simplement à photographier, c’est un casse-tête) : les arbres sortent de la toile, cet environnement est trop sombre, les taches de lumière si pittoresques ne donnent rien, comment rendre cette sensation de profondeur tout en décrivant scrupuleusement les arbres et les feuilles… La peinture de Carr est l'expression d'une personnalité artistique forte, remarquable et sa représentation des forêts ne ressemble à aucune autre.
Carr, Entre les arbres, 1936, Vancouver Art Gallery
En l’occurrence, Carr choisit un mode de peinture pleine de mouvements, avec des couleurs sombres et une touche dynamique. Les grands cèdres semblent doués d’une vie propre et mystérieuse. Ce n’est pas une peinture séduisante, mais majestueuse, qui rend compte de l’obscurité associée aux forêts, mais aussi d’une certaine spiritualité.
Rivage et forêt à Cordova Bay, 1931, Great Victoria Art Gallery et Troncs d'arbre, 1931, Vancouver Art Gallery

Et les totems. Sans faire de Carr une précurseuse quelconque en ce qui concerne les Premières nations, elle est la première à les regarder pour de bon. À son époque, les totems sont encore nombreux à s’élever sur les rivages et dans les villages abandonnés. Certains tombent en ruine, d’autres sont enlevés par les musées. Pour une peintre, ce sont des motifs spectaculaires. Ils habitent les toiles d’une présence particulière et expressive.
Blunden Harbour, 1930, Musée d'Ottawa.
Chemin des totems à Sitka (Alaska), 1907, Great Victoria Art Gallery.
Grand aigle, Skidegate (BC), 1929, Great Victoria Art Gallery.
Les toiles de Carr sont visibles à l’Art gallery de Vancouver (attention, ce ne sont que des expositions temporaires et quand j’y suis allée, il n’y avait pas de totems), au Musée d’art d’Ottawa, à celui de Toronto que je ne connais pas (pas encore), à l’Art gallery of Greater Victoria (que des expositions temporaires là aussi). À Victoria, on peut visiter sa maison, où il n’y a rien d’exceptionnel, mais la dame de l’accueil est charmante et sera émerveillée de voir que des Français de France s’intéresse à l’artiste. On peut aussi se recueillir sur sa tombe.




Séjour sur la côte ouest du Canada : présentation de Vancouver ; brève histoire de Vancouver ; les peuples autochtones canadiens ; Nation Haida (la vannerie ; les objets en pierre ; les totems ; les masques) ; découverte de la ville de Victoria.

2 commentaires:

  1. Arrivée ici via le blog de Dominique, retenue par la citation de Proust, je suis très intéressée par ce billet sur une peintre que je ne connaissais pas du tout. J'aime son "chemin des totems" et sa pierre tombale, merci pour toutes ces illustrations qui donnent un bel aperçu de son univers.

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    1. En France elle n'est pas du tout connue, je l'ai découverte en allant au Canada. En plus, peintre anglophone, donc peu de choses à lire en français.

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