La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la littérature.



mardi 21 novembre 2023

C’était un pommier qui dévorait ses propres pommes.

 

Herta Müller, L’Homme est un grand faisan sur terre, traduit de l’allemand par Nicole Bary, publication originale 1986.

 

Un tout petit livre, d’une grande violence.

Dans un village de Roumanie, nous comprenons rapidement que Windisch, le meunier, souhaite émigrer et donne régulièrement des sacs de farine aux autorités adéquates pour obtenir un passeport. Mais le seul moyen de faire avancer son dossier est que les femmes soumettent leur corps à ces personnages.

Finalement, la famille réussira à partir à l’Ouest.


Amélie attrape le petit flacon de vernis à ongles. Windisch sent le grain de sable sous son crâne. Il le fait passer d’une trempe à l’autre. Du flacon une goutte rouge tombe sur la nappe.


Le livre est très court, composé de petits chapitres et de phrases brèves. Comme souvent chez Müller, c’est par la description tourmentée du monde des objets et de la nature que passe l’évocation des relations sociales. Roumains et Allemands, souvenirs de la guerre récente, hommes et femmes, ce monde est bien sordide.

Tapisserie, détail d'une Chasse à la licorne, 1495-1505, 9NY Cloisters
je suis très contente d'avoir trouvé un faisan dans le fatras de mon ordinateur.

Tous les matins, quand Windisch roule dans l’ornière en cahotant, il se dit : « Ça va être la fin. » Depuis que Windisch veut émigrer, il voit la fin partout dans le village. Le temps s’arrête pour ceux qui veulent rester. Que le veilleur de nuit reste, c’est pour Windisch au-delà de la fin.

 

Une pierre prise dans la chaux ouvre la gueule. Le pommier tremble. Ses feuilles sont des oreilles. Elles épient. Le pommier nourrit ses pommes vertes.

 

Mon billet est court, car je l’écris plus d’un mois après ma lecture, mais si vous ne connaissez pas l’autrice, je vous encourage à commencer par ce titre, très puissant.



Ce billet constitue ma troisième participation aux Feuilles allemandes d'Eva et de Patrice et de Livr'Escapades.


Herta Müller sur le blog :

La Convocation - 2nd billet
La Bascule du souffle - 2nd billet
Le Renard était déjà le chasseur

 

P. S. Je suis restée sans internet pendant quelques jours (la faute à un coup de pelleteuse trop généreux) et j'ai pris du retard dans la lecture de vos blogs, mais ne vous inquiétez pas, j'arrive.

 

 

10 commentaires:

keisha a dit…

J'ai commencé La bascule du souffle. Rien à faire. Sans doute pas assez persévéré.

nathalie a dit…

Celui-ci te plairait peut-être davantage, il me semble moins difficile.

Dominique a dit…

une auteure que j'apprécie beaucoup et ce petit livre m'avait au moment où je l'ai lu laissée très frappée un vrai grand moment de littérature

nathalie a dit…

Oui tout petit mais c'est très fort !

miriam panigel a dit…

j'ai essayé de le lire à l'occasion de notre voyage en Roumanie, je suis restée bloquée après quelques dizaines de page.

nathalie a dit…

Ah c'est dommage. Il est vrai qu'elle n'a pas une plume qui se donne facilement.

Livr'escapades a dit…

Merci pour cette déjà 3ème participation. J'avoue ne pas avoir encore osé m'attaquer à l'oeuvre der Herta Müller mais le jour où je le ferai, je garderai ta suggestion à l'esprit.
Fabienne

nathalie a dit…

Comme tu vois, je la fréquente depuis quelques années !

je lis je blogue a dit…

J'ai lu "Animal du cœur" d'Herta Müller l'an dernier pour les feuilles allemandes. J'avoue que ce roman m'a donné du mal et j'ai du m'accrocher pour le terminer...

nathalie a dit…

Ah je ne connais pas du tout ce titre ! C'est vrai qu'elle a une écriture ardue.